Les Filles de la Charité à Vannes

La Ville de Vannes située en Bretagne dans le département du Morbihan, près du Golfe, jouit d’un microclimat.

Vingt-trois ans après la mort de leur Fondateur, Saint Vincent de Paul, les Filles de la Charité, appelées alors « Sœurs grises », du fait de leur robe grise, arrivent à Vannes en 1683, en réponse à l’appel de l’Evêque, Monseigneur VAUTORTE.  Sœur Ganeau, Sœur Blanchet, Sœur Corneuf et Sœur d’Angerville s’installent trois ans dans une maison de louage rue de la Porte Saint-Patern : « Nous fûmes appelées par les Dames charitables de la Ville, avec l’agrément de Mgr VAUTORTE, pour y servir les malades de ladite Ville et Faubourg, y distribuer la marmite, les remèdes et les aumônes confiées à nos soins ».

En 1686, un « Maistre menuisier » leur donne une maison rue du Poulho, pour y installer leurs œuvres. Elles y demeurent jusqu’en 1704.

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En 1705, Mgr d’ARGOUGES propose aux Filles de la Charité la direction de l’Hospice Saint Yves dit « des incurables », au lieudit « LA GARENNE » (1).  Les « Incurables » étaient de pauvres malheureux atteints de maladies contagieuses qui n’étaient pas admis dans les Hôpitaux généraux. Les Sœurs, Pierrette Guérin, Marie Cuissin, Catherine Plet et Jeanne Courtois arrivent à l’Hospice le 12 décembre.
Très vite, les quatre Sœurs sont surchargées de travail à cause de nombreux malades de la Ville ; pour les soulager une cinquième Sœur arrive.

En 1709, s’ouvre le Bureau des Pauvres ou Bureau de Charité, qui fonctionne jusqu’à la Révolution. Plus tard, le Bureau de Bienfaisance de la Ville sera confié aux Filles de la Charité à la Garenne ; deux nouvelles Sœurs seront appelées pour distribuer les secours soit à l’hospice, soit à domicile : une Sœur pour Saint Pierre et une Sœur pour Saint Patern.

Au moment de la Révolution, la Communauté comptait huit Filles de la Charité qui s’occupaient des « 65 pauvres à nourrir et à soigner de l’hospice » et des indigents de la Ville.

Le 21 mai 1791, l’arrivée d’un Evêque constitutionnel met les Sœurs dans une position difficile… Le Directoire décide leur renvoi, après les avoir menacées de les promener sur des ânes, livrées aux risées de la ville ! Elles retournent à la Maison Mère.

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Après le Concordat de Napoléon en 1801, les Sœurs grises sont rappelées le 7 juillet 1803 par la Commission des Hospices de Vannes ; elles retrouvent leur maison et reprennent leurs activités. Comme avant la Révolution, l’hospice compte 60 lits : 20 pour les hommes et 40 pour les femmes.

En 1830, une maison de charité est établie sous le nom de la « PROVIDENCE » par trois Dames de Vannes : Madame BERNARD, veuve d’un Commissaire de la Marine, Mademoiselle MAILLARD et Mademoiselle HERVIEUX.

« Le but de l’œuvre était d’accueillir des jeunes filles dont la moralité se trouvait compromise, de les élever dans les principes chrétiens et les habitudes de travail afin de les mettre à même de faire de bonnes domestiques… Elles réunirent tout d’abord six jeunes filles dans une chambre qu’elles louèrent, sise rue des Chanoines N° 2. L’œuvre prit de l’extension, elles transportèrent l’Etablissement dans une maison de la même rue dite Le Moine, derrière la Cathédrale… En 1833, le père de Mademoiselle HERVIEUX veut consolider l’Etablissement ; il acquit une maison sise rue du Nord N° 7 où l’Etablissement fut transféré. »

En 1851, après avoir acquis en supplément les maisons n° 3 et n° 5 rue du Nord, Mademoiselle HERVIEUX demande à la Communauté des Sœurs de prendre la responsabilité de l’œuvre de la « PROVIDENCE » dont elle est la fondatrice.

« L’œuvre s’est complétée par l’annexion du service du Bureau de Bienfaisance ; en sorte que le personnel se compose dès lors d’une Supérieure, de deux Sœurs dites « mères des pauvres », d’une autre Sœur dite « mère des prisonniers, d’une Sœur chargée de la Direction de la Providence et directrice des orphelines. Les deux « sous-maîtresses » restèrent dans la maison jusqu’à leur mort. Deux Sœurs furent « fondées » par la ville pour les malades à domicile et la pharmacie, une autre Sœur pour la prison. »

Les Sœurs créent une école en 1858. Une Sœur écrit :

« J’ai été autorisée par le Père général à fonder une classe ; sans aucun fonds pour cela, m’appuyant uniquement sur la divine Providence qui ne nous a jamais manqué. »

 Et en 1860, à l’appel d’un vicaire, au sein du patronage des jeunes filles, naît l’Association des Enfants de Marie.

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Le 31 mai 1866, la Commission des Hospices, en vue de faire des économies, arrête que « les Incurables » seraient transférés à l’Hôpital civil et militaire tenu par les Sœurs de la Miséricorde de Jésus.

En 1868, l’Orphelinat situé rue du Nord, près de la Cathédrale, s’établit dans les locaux de l’Hospice devenus libres.  L’Etablissement de « LA GARENNE » change complètement de destination et s’appelle alors « LA PROVIDENCE ». Il devient un Asile pour l’Œuvre des Orphelines.

La Supérieure générale, Sœur Félicité LEQUETTE, fait l’acquisition des bâtiments de l’hospice de la Garenne, ouvert avant la mort de Saint Vincent de Paul et qui appartenait aux Sœurs avant la Révolution. Des constructions nouvelles sont réalisées, bien conçues pour l’époque : les enfants ont de l’espace et du bon air.

« Les Supérieurs témoignèrent du désir de voir cet établissement rester aux enfants de Saint Vincent. Ce n’était que ruines. Il fallait le courage et la foi de Sœur Noyrit pour entreprendre un pareil travail. Ces Messieurs ne voulant plus y faire de réparations depuis longtemps, l’avaient entièrement abandonné. Nous possédions plusieurs maisons de la rue du Nord qui furent vendues pour l’achat de l’hospice Saint Yves. »

En 1869, deux Sœurs arrivent à Vannes pour commencer l’Ecole communale avec deux classes ; puis une 3ème en 1877 et une 4ème en 1882. En 1890, l’Ecole comptait 274 enfants.

En 1882, sur la demande de l’Inspecteur d’Académie et du Maire de Vannes, une Ecole Maternelle située rue de Séné n° 25 est ouverte et bénie le 11 janvier 1883 par l’aumônier de la maison.

En 1890, l’Œuvre du Patronage, composé au début des enfants de l’ouvroir externe, commence dans la maison de La Providence.

« Le local devenu insuffisant pour les réunions du dimanche, sur un terrain acheté face à notre jardin, rue du Verger, une salle de 30 mètres de long avec un 1er étage fut construite, en prévision d’une Bonne Garde. La bénédiction du Patronage du Sacré Cœur eut lieu le 12 février 1893. »

En octobre 1903, un cours ménager s’ouvre qui ne dure que deux ans car les familles ne comprennent pas l’opportunité de cet enseignement. Mais en octobre 1910, l’école ménagère est définitivement organisée.

Durant la Guerre 1914, les jeunes filles servent aux Ambulances avec dévouement.

Par ailleurs, la difficulté de trouver des vivres est cause de la fermeture momentanée des cours.

Après la Guerre, en 1934, c’est l’ouverture d’un cours professionnel.

Une Sœur écrit le 18 juin 1944 :

« Notre Garenne est une vraie ruche bourdonnante de jeunesse, environ 190, sans compter les externes, de 20 mois à 20 ans, dont une bonne partie sont orphelines, mais je ne veux pas leur donner ce nom qui semble les mettre à l’arrière-ban de la Société et nous n’avons pas du tout un régime d’orphelinat ; notre éducation est tout à fait familiale. La Garenne, appelée aussi La Providence est fidèle à la mission de Saint Vincent…
Elle rejoint tous les pauvres :

  • dans le quartier de la Cathédrale 200 familles sont visitées (300 portions à la soupe populaire ; des bons de pains, de viande, de pâtes, des sabots, etc…)
  • à Saint Patern : 300 familles et 500 portions
  • la « goutte-de-lait » : 234 jeunes mamans visitées et 60 consultations de nourrissons en moyenne
  • la pharmacie avec ses 2 500 ordonnances par an
  • le Dispensaire où pansements et surtout piqûres abondent
  • le Jardin d’enfants avec 60 enfants où les bons du Secours National aident à leur donner un repas à midi
  • les « Louise de Marillac » qui apportent chez les pauvres « vieilles » leur sourire et leur aumône. »

En 1950, le cours professionnel se transforme en Ecole Technique pour jeunes filles de condition modeste. Pendant les vacances les bâtiments deviennent un Centre Aéré.

En 1960, une Fête est organisée à VANNES pour le Tricentenaire de la mort de Saint Vincent de Paul (1660-1960).

« Le 2 octobre s’ouvre le Triduum à l’Eglise Saint Patern : spectacles, conférences, film sur la vie de Saint Vincent… Les vieillards suivis par les cinq Conférences de le Charité ont été invités…24 « taxis » vont chercher et reconduire ceux qui ne peuvent se déplacer… la joie se lit sur leur visage lors des chants et danses des jeunes du Cercle Celtique… brioches et chocolat chaud, puis petit colis de douceurs à emporter… rendez-vous en 2060 ! »

En 1965-1966, les Sœurs de la Communauté 1 Place de la Garenne ont leur changement. C’est aussi la fermeture de la Maison d’Enfants, du jardin d’Enfants et de l’Ecole professionnelle.

En 1966, la vétusté des locaux exige une reconstruction de la « GARENNE », d’où sa fermeture. L’Ecole Technique fait double emploi avec d’autres Etablissements tenus par des religieuses. Le Centre de Soins est transféré dans un nouveau quartier de la Ville.

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D’où l’implantation nouvelle sur la Paroisse Saint Guen, à proximité de la ZUP de Ménimur au 49 avenue Wilson, avec l’arrivée de quatre nouvelles Sœurs. Leur rayon d’action s’étend sur le quartier de Saint Guen et sur les quartiers situés à l’Est de Vannes, jusqu’à la route de Nantes. Leurs activités sont : formation des mamans catéchistes et catéchismes, patronage et groupe de jeunes adolescentes, Centre aéré à Moustérian, visite des vieillards, Centre de soins et soins à domicile. 

En 1975, la Communauté est composée de sept Sœurs. L’une d’elle répond à un appel pour une mission auprès des Gens du Voyage « Gitans » ; d’autres pour des Mouvements vincentiens et la Fraternité Catholique des Malades et Handicapés.

Le 6 septembre 1982, les Filles de la Charité quittent Vannes.

(1) Saint Yves, prêtre breton en 1303, rendit la justice et défendit la cause des orphelins, des veuves et des pauvres.

 Nous n’avons qu’une seule photo dans les archives : la maison 49 avenue Wilson à VANNES.

Sœur Annie GESRET, Archiviste provinciale